Dans ce deuxième épisode consacré au burn-out, je vous raconte la suite de l’histoire de Camille. Comme je l’ai dit dans le premier épisode, cette histoire est inspirée de mes lectures, des enseignements que j’ai suivis, des reportages que j’ai visionnés sur ce sujet, de mon expérience de thérapeute aussi.
Il s’agit donc d’un scénario, que je raconte comme un témoignage. Il raconte une vérité, une vérité parmi d’autres…
Burn out : Le sentiment d’illégitimité
Je suis en incapacité de revenir travailler…mon corps me l’a dit. J’ai besoin de repos, je me sens tellement fatigué. Je dors beaucoup, mais pas très bien, je me réveille souvent. Je n’ai pas envie de faire grand-chose. Quel sentiment étrange d’à la fois constater cette forme de néant et d’à la fois sentir que je ne peux m’en emparer pour me dire et me sentir malade.
Quelle confusion. Je suis à la fois avec cette certitude de ne pouvoir aller travailler et cette forme d’incrédulité. Je me sens non fonctionnel sans vraiment me sentir légitime de ne rien faire. Le burn-out, mon alien invisible. Ce sentiment de vide, cette non-envie, cette sensation d’être consumé, d’être profondément touché et blessé. Tout cela est en moi mais ne se voit pas. Comme je me sens seul à pouvoir l’attester, comme il m’est difficile de le démontrer. Parce qu’elle est bien là aussi cette sensation de devoir se justifier. Il est bien là, ce sentiment d’illégitimité. Ce n’est pas comme si j’étais immobilisé, après une grave opération. Non, non…pas de plaie, pas de cicatrice, pas de pansements qui parlent pour moi.
Ce soir, j’ai rendez-vous avec un psychiatre, sur recommandation de mon médecin généraliste. C’est le psychiatre qui va prendre le relai…pour diagnostiquer mon état, gérer mes arrêts de travail et évoquer avec moi l’accompagnement à mettre en place. Et s’il ne me croyait, si j’étais obligé de revenir travailler. J’appréhende ce rendez-vous. Revenir travailler : NON, j’en ai tellement peur.
Se sentir responsable et coupable
Et puis quoi… si j’étais assez fort, tout cela ne me serait pas arrivé. D’ailleurs mes collègues vont bien, eux. Je me suis battu, j’ai essayé, j’ai vraiment donné le change…. Je me suis tellement investi pour garder intacts la valeur et le sens de mon travail, malgré le nouveau rythme imposé, les nouveaux objectifs. Je ne comprends pas…suis-je incapable de m’adapter ? Je me sens responsable et coupable de cette situation. Coupable de ne pas être parvenu à atteindre les objectifs et à me développer comme mes collègues. Coupable d’abandonner... « Je ne suis pas assez, j’ai échoué », me répète ma petite voix.
Coupable aussi d’avoir eu besoin et d’avoir encore besoin de cette reconnaissance au travail. Reconnaissance que je n’ai pas eue. Ne suis-je pas encore assez grand pour avoir besoin du regard d’un autre pour avancer ?
Et puis, je laisse toute mon équipe derrière moi, mes clients aussi. J’ai l’impression de les abandonner à leur sort, comme si je désertais…pendant ce temps, je suis chez moi et me repose, alors qu’eux sont au travail et doivent peut-être assurer ma part. Comme je m’en veux de les laisser avec tout ça…pourtant, je n’ai plus d’énergie, je n’ai plus de force. Je n’ai plus d’énergie, je n’ai plus de force…je n’ai plus d’énergie, je n’ai plus de force…mon corps me dit toujours non.
Côtoyer le vide et ne plus se sentir utile
Cela fait maintenant 10 semaines que je suis en arrêt de travail. Mes seuls contacts avec l’entreprise sont pour annoncer que mon arrêt de travail est prolongé. Je ne peux pas encore envisager la reprise du travail et ne sais pas encore si je vais pouvoir le reprendre un jour. Je me sens errer dans un monde qui m’était inconnu…celui de l’inactivité professionnelle. Quelle sensation étrange que celle de côtoyer le vide. Quelle sensation étrange de ne plus se sentir utile. J’ai l’impression de ne plus contribuer au monde. Je commence à ressentir au fond de moi combien cette contribution me manque, combien il est important pour moi de participer à « faire du bien ». Je me sens un peu démuni face à cette étendue de vide mais quelque part, je suis reconnaissant de pouvoir ressentir le sens et la valeur que je recherche dans le travail. Comme si je me retrouvais un peu dans cet essentiel. Pour autant, je n’ai pas encore assez de force, ni assez d’énergie. Non, je n’ai retrouvé ni ma force, ni mon énergie…mon corps me dit toujours non…mon intérieur a besoin d’être écouté pour se réparer.
La suite au prochain épisode...
Sandrine Da Dalto Parola Thérapeute à Toulouse